vendredi 27 mars 2009

La Douleur de Marguerite Duras

(Gallimard/Folio, 1993, 217 pages)


1944, c’est la Libération de Paris, Marguerite Duras n’attend plus que celle de son mari –qu’elle appelle Robert L. (Robert Antelme), un résistant arrêté par la Gestapo et détenu dans le camp de Buchenwald.

C'est l'histoire d'une attente fiévreuse, d'une dévotion à la résistance et à l'espoir. Cette ineffable errance, elle est parvenue à l’écrire dans ce journal autobiographique nommé « La douleur », refuge dérisoire contre l’étreinte de l’absence.

Les phrases autant que les pensées sont fragmentées, elles se dissipent vers l’espoir ou se figent dans l’immensité de l’attente. On ploie au fil des pages sous le fardeau des jours, sous le discours erratique de l’auteur.

Les longs couloirs du Centre d'Orsay où transitent les prisonniers, sont rongés par ceux qui sont restés et qui piétinent dans l’infirmité du temps.

Robert L….un nom qui vient nous hanter. On l’attend avec elle. On suffoque, on s’essouffle.

On le retrouve enfin et on finit par se rendre compte qu’un homme peut disparaître corps et âme, traumatisé par une incommensurable douleur. Duras trouve les mots, alors même que la conscience renonce.

Cette douleur est multiple. Il y a celle de Marguerite, celle des autres familles qui attendent, celle des déportés en sursis et celle de la France qui attend de renaître. Il y a la douleur du corps, dissout, étique, désincarné et celle du cœur, atrophié.

La douleur s’exprime par phrases émiettées, jetées comme des derniers souffles. Elle est un long cri acharné, devant le décharnement de la France et de sa liberté. C’est la vérité nue de l’atrocité des camps et le combat de la dignité dans les ruines charnelles. La résistance dans le combat, la résistance dans l’attente, dans le sursis de la résurrection.

Cette vie qui reprend sur les décombres nationaux, sur les vestiges intimes, elle l’écrit avec une justesse et une force déconcertante…


Afin de transmettre ce texte troublant, Patrice Chéreau met en scène -avec la complicité de Thierry Thieû Niang-.l’une de ses actrices fétiches, la saisissante Dominique Blanc. La représentation aura lieu les 4 et 5 avril au TnBA.


Céline Cuny, Mathilde Lechon, Marie Clergeaud, Noémie Defaye.

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