lundi 13 avril 2009

Trois jours à l'escale du livre

Si l' Escale du livre devait être une danse, elle serait le mélange d'un flamenco endiablé et d'une valse joyeuse. La chaleur sous le chapiteau nous animait d'une fureur de vivre, debout sur nos deux jambes à surveiller les mauvais esprits voleurs d'ouvrages. Si nous les surprenions, nous tapions du pied, le sourcil levé (d'où le flamenco).

La valse, quant à elle, s'éveillait lorsque nous courions après ces mauvais esprits, zigzaguant dans la foule tiède. Nous valsions aussi lorsque nous étions heureuses en fin de journée, ivres avant le vin, après 13 heures d'observation intense. Car l'escale du livre, lorsque l'on est stagiaire et apprentie à l'IUT Michel de Montaigne, c'est d'abord un petit bain de foule du dimanche bien mérité, puis cela atteint une dimension inattendue: derrière nos regards méfiants se cachent nos sens émerveillés par lui, l'unique, l'objet de toutes ces convoitises: Le livre. Avec ses belles pages, ses couvertures plus folles les unes que les autres, il est pris, tourné, retourné, lu, relu, questionné, emprunté, parfois volé. Partager cet objet de mystère avec les gens fait partie des joies qui animent toute personne aspirant à devenir libraire. Orienter, avec toujours cette peur de décevoir, parce que nous ne sommes que des humains qui font part d' un ressenti sur un ouvrage (petit clin d'œil à ceux qui exhorte le libraire pour un compte rendu pointu sur chaque ligne des livres qui se tiennent devant lui).

Trois jours à l'escale c'est, au delà d'une perpétuelle douleur aux talons, une course folle qui nous ouvre sur l'avenir. Un avenir fait de rencontres, avec les professionnels, une clientèle avertie, et des auteurs. Auteurs qui nous ont ému, certains face à la cette éternelle contradiction: écriture de l'intime mais obligation pour en vivre de se montrer, et de prendre le risque de passer une journée seul face à une montagne de leur propres œuvres, sans en signer une seule. Ces œuvres qui tout d'un coup ne leur appartiennent plus. 

Trois jours à l'escale, c'est beaucoup de sourires, certains faux, mais d'autres profondément vrais et salvateurs: avec nos proches venus nous voir, nos collègues du stand, nos collègues du stand d'à côté, ceux du stand au bout du chapiteau, ceux du chapiteau d'à côté. Une grande famille que l'on se crée petit à petit, oubliant les pseudo intellectuels (façades de savoir) qui vous ont pris pour la serveuse de vin du stand, pour se tourner vers ceux qui ont compris ce que c'est de s'imprégner d'un ouvrage, le vivre et le partager. 

Emma Foucher (stagiaire à la Colline aux livres) AS Édition/Librairie.



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